Résumé : |
Plusieurs remplissages de paléokarsts ont été étudiés, dont le plus important provient d'une paléo-rivière souterraine. Cette dernière apparaît actuellement sous la forme d'une succession de tronçons d'une galerie colmatée, puis exhumée à la suite de la dénudation karstique.
Ces segments de grotte décapitée se suivent à l'altitude de 360-380 m sur une longueur en ligne droite de 5,2 km. Trois remplissages détritiques ont été mis en évidence, qui sont par ordre stratigraphique : 1) des limons et sables micacés beiges représentant des alluvions immatures exogènes au karst et dont l'âge miocène terminal a été révélé par des restes de rongeurs et par le contexte paléokarstique; 2) des argiles et grès rouges matures, dont l'origine est locale et dont l'âge varie de miocène terminal à récent ; 3) des brèches de gélifraction pléistocènes. La pétrographie des alluvions immatures est comparable à celle des graviers de l'Ardèche actuelle, qui coule à proximité, profondément encaissée dans un canyon. La paléo-rivière souterraine était très probablement alimentée par des pertes partielles de l'Ardèche alors qu'elle coulait à l'altitude de 360-380 m, soit 300 m plus haut que l'actuelle. Les faibles variations de l'altitude du conduit fossile suggèrent une formation sur niveau hydrostatique. L'âge biostratigraphique des alluvions immatures et le contexte paléokarstique indiquent qu'elle était probablement encore active entre les âges de ~5,6 et ~5,45 Ma, c'est-à-dire, au maximum, peu avant le début de l'assèchement profond de la Méditerranée (la crise de salinité messinienne) et, au minimum, déjà pendant l'incision des canyons messiniens. Dans cette dernière option, bien que l'érosion régressive ait pu déjà être en progression à partir des côtes, elle n'aurait pas pu atteindre la région étudiée et donc pas encore pu vidanger l'aquifère karstique profond. Cette rivière souterraine fossile permet aussi une appréciation plus précise de l'évolution de la morphologie du karst ardéchois. |